mardi 6 mars 2012

Pour les poissons d'aquarium qui s'intéressent à la mer



C'est un livre anglais; il se présente donc comme ces devantures de pubs d'un autre âge avec des gammes colorées un peu sourdes, de "bon goût", une typographie encore à la main, calée à l'oeil, aux empattements affirmés de la main sûre d'un calligraphe expert qui sait encore juger de la graisse appropriée par rapport à l'espace disponible, à l'impact et à l'esprit souhaité... C'est sensible, fait avec la certitude que le Beau et le Laid existent et qu'il faut donc faire des choses belles, autant que faire se peut. C'est sur que ça m'a changé de mes manuels d'embrèvements de charpente aux photos à peine décryptable avec des abaques aussi attractifs qu'un bottin téléphonique, aux croquis moches et parfois efficaces de mes traités de soudures imprimés sur papier Q, quasiment photocopiés, les textes tapés à la machine y étant fidèlement reproduits, ratures et bavures comprises.

C'est donc très joli et l'ensemble évoque plus Marie-Chantal et ses pulsions bucoliques qu'un manuel pratique pour savoir faire les choses nécessaires que nous avons oubliés par fatuité, certitudes bêtes, paresse coupable.

Quelle ne fut pas ma surprise d'y trouver une langue alerte et sûre de sa science, un humour pince-sans-rire qui traduit bien le coté "vécu" du détail, une richesse d'informations dans laquelle on se perd volontiers.

Entendons nous bien : ce n'est pas en ingurgitant ces 200 pages qu'on redevient cet incroyable puits de science et de savoir que furent nos paysans et artisans d'autrefois. Mais pour les poissons d'aquarium que nous sommes devenus, trop nourris, atrophiés de corps et d'esprit, fatigués de nous-mêmes, il constitue un bon point de départ utile pour celui qui cherche à sortir de sa cage de verre et s'intéresser à sa mer d'origine. C'est un ouvrage générale où énormément de choses sont vues: de l'apiculture à la bourrelerie en passant par l'abattage des bêtes... Pour juger de la valeur de l'info, je vais directe aux domaines où je prétends à quelques compétences : évidement je ne conseille à personne de se lancer dans le chantier de sa dalle de 150 m2 sur vide sanitaire après avoir parcouru les 3 ou 4 pages dédiées au gros oeuvre... il serait bien en peine. Mais il me semble que c'est tout de meme une lecture qui, si elle peut un tant soit peut sortir son prochain de son bourbier contemporain en lui donnant un aperçu des choses oubliées, perdues, qui avec un effort certain peuvent être reconquises, peut aussi donner une alternative à nos modes de vie sous cellophane. Modes de vie dont la fragilité rend de plus en plus de personnes conscientes de leur vulnérabilité en ces temps de rois nus et d'incertitudes en tout genres.

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